Inquiet pour 2027, le nouveau patron du Grand Orient de France prône de « réparer la République »
Écrit par Dimitri sur 10/09/2023
« Il faut réparer la République »: le nouveau patron du Grand Orient de France (GODF), Guillaume Trichard, dit son inquiétude sur l’extrême droite et sa volonté d’ouverture pour « montrer que la franc-maçonnerie n’est pas secrète ».
A 47 ans, l’ancien secrétaire général adjoint de l’Unsa est devenu le 25 août Grand maître du GODF, première obédience française qui fête cette année les 250 ans de l’appellation « Grand Orient de France ».
Sous le plafond bleu du temple où il reçoit l’AFP, au siège du GODF, devant un autel orné du compas et de l’équerre maçonnique, il tient à dissiper quelques clichés élitistes sur son obédience: « toutes les classes sociales et professionnelles sont représentées. On a des ouvriers, des techniciens, des agents de maîtrise… je souhaite que ça s’accentue, parce que le Grand Orient de France est à l’image de la société ».
Le GODF compte aujourd’hui 52.500 membres et 1.392 loges. Après le « tassement » provoqué par la crise sanitaire « on a repris une courbe ascendante depuis trois ans, avec beaucoup de candidatures spontanées de jeunes entre 20 et 30 ans », ajoute celui qui a été initié à 23 ans.
Un « rebond » lié à la « politique d’ouverture » entamée depuis quelques années pour montrer que la franc-maçonnerie « n’est pas secrète », et que Guillaume Trichard compte « pérenniser ».
Il y aura ainsi, au printemps prochain, des « journées utopia masonica » où les loges seront « invitées à ouvrir leurs temples, organiser expositions, concerts, débats… » En cette année 2024 d’élections européennes et de commémoration de la Libération, l’événement aura pour thématique « Résister ».
Car « je suis très inquiet de la montée des populismes », affirme Guillaume Trichard, qui redoute qu' »en 2024 des partis d’extrême droite, dans une Europe en guerre, soient à nouveau vainqueurs dans certains pays ».
En France « on a le sentiment que notre République est aujourd’hui menacée, notamment par le risque très probable d’accession au pouvoir de l’extrême droite » ajoute-t-il, voyant « des risques pour les municipales de 2026 et présidentielle de 2027 ».
« loges féminines »
« Les quatre piliers de notre République indivisible, laïque, démocratique et sociale semblent mis à mal », affirme-t-il devant un buste de Marianne, dans ce temple dont la voûte s’orne de la devise « Liberté Égalité Fraternité ».
Après le mouvement des Gilets jaunes « cette crise sociale qu’on a retrouvée avec les grandes manifestations contre la réforme des retraites existe toujours », avertit l’ancien responsable de l’Unsa.
Ce parcours syndical « fait que la justice sociale est dans mon ADN. Mais elle est aussi dans l’ADN du Grand Orient de France depuis des décennies ».
« Une République, pour qu’elle soit forte, a besoin de services publics forts. Les francs-maçons feront des propositions, sur l’accès aux soins, l’école, la police, la justice… tant qu’on n’aura pas répondu concrètement à ces problématiques qui donnent le sentiment à des Français d’être oubliés par la République, il ne suffira pas de brandir des grands mots pour arrêter la croissance de l’extrême droite », avertit-il.
« Nous estimons qu’il faut réparer la République », martèle le responsable qui donne au GODF un rôle de « sentinelle »: « Nous ne sommes pas un parti politique, pas une organisation syndicale, mais une organisation qui vise à transmettre un certain nombre d’idées dans le débat public ».
Alors que la rentrée est marquée par un débat sur la laïcité, il se dit « évidemment » pour l’interdiction de l’abaya à l’école, mais l’assure: « l’important à présent est d’accompagner les enseignants » pour que l’école « reste ce lieu de neutralité religieuse mais aussi politique ».
Quant à la féminisation de l’obédience, lancée en 2010, Guillaume Trichard souligne la « liberté » laissée aux loges en la matière: « certaines sont masculines, d’autres mixtes et peut-être aurons-nous des loges féminines ».
L’obédience compte 6.147 « soeurs » et trois d’entre elles viennent d’être élues au Conseil de l’ordre. « On peut imaginer que dans quelques années une soeur sera Grand maître » puisque, rappelle Guillaume Trichard, « nous ne féminisons pas les titres ».